Une campagne de relations publiques pour refaire son image

  • Dernière mise à jour le 27 décembre 2004.

Retransmises àsatiété aux nouvelles télévisées, les images d’un sous-marin canadien en panne, ballotté par la houle dans l’Atlantique Nord, et d’ambulanciers transportant un marin inconscient sont devenues l’emblème de ce qui ne va pas dans le programme canadien de sous-marins. Ce sont des images que la marine tentera de faire oublier aux Canadiens au cours de l’année qui vient.

Une des façons dont elle compte s’y prendre consiste en une campagne de relations publiques : on pourrait, par exemple, arranger le voyage d’une personnalité connue à bord d’un sous-marin, organiser davantage de visites des submersibles à l’intention des médias, et accélérer le processus d’octroi des médailles à l’équipage de l’infortuné NCSM Chicoutimi.

Le Chicoutimi fait partie d’un groupe de quatre sous-marins usagés, achetés des Britanniques à prix d’aubaine à la fin des années 1990. Au cours de son premier voyage en direction du Canada, il a subi un incendie majeur, d’origine électrique, le 5 octobre, au large des côtes d’Irlande. Le sinistre a causé la mort du lieutenant Chris Saunders, et blessé plusieurs autres sous-mariniers. La cause de l’incendie n’a pas encore été identifiée.

Bien que les Canadiens en aient peut-être assez d’entendre parler du sous-équipement chronique et des attentes démesurées à l’égard de l’armée, le sort du lieutenant Saunders a semblé toucher un point sensible. A tout le moins, l’incident en a forcé plusieurs, y compris le premier ministre Paul Martin, à réexaminer les coûts humains associés à plusieurs années de limitations budgétaires.

L’incendie du Chicoutimi n’a pas seulement porté un coup au programme de sous-marins, il a terni la réputation des forces navales elles-mêmes, lit-on dans des documents militaires obtenus par la Presse Canadienne en vertu de la Loi d’accès à l’information.

Et il faudra plus qu’une opération de relations publiques et des séances de photos avec des célébrités pour redonner confiance dans les sous-marins canadiens, prévoit un analyste militaire. « L’enquête sur l’accident doit déposer ses conclusions, et ces conclusions doivent être très franches », estime David Rudd, le président de l’Institut canadien des études stratégiques. Sinon, aucune stratégie de communications ne sera efficace, selon lui.

L’armée mène une enquête interne dont les résultats devraient être divulgués l’an prochain. Une enquête parlementaire distincte sur l’achat des sous-marins usagés se poursuivra d’ici au printemps. Les conclusions de cet exercice pourraient déterminer si le programme de sous-marins survivra ou pas.

Interrogé en Écosse peu après l’accident, le ministre de la Défense, Bill Graham, avait refusé d’écarter toute possibilité.

Selon le commodore Chris Henderson, chargé des affaires publiques de l’armée, le plan de relations publiques n’est qu’un élément de la stratégie des forces navales à l’égard de ce tragique incident. Il va falloir travailler dur, dit-il, et d’abord, quand les sous-marins seront prêts, les faire naviguer, et faire en sorte qu’on voie qu’ils naviguent.

Marc Milner, un historien de l’Université du Nouveau-Brunswick, pense que la controverse suscitée par l’accident s’éteindra une fois que l’armée aura diffusé son rapport. D’ici là, la meilleure façon, selon lui, de redonner confiance envers la marine est de « garder le cap et rendre les sous-marins fonctionnels aussi vite que possible ».

Et surtout, il faut que les forces navales et leurs dirigeants politiques résistent à la tentation de saborder le programme de sous-marins. Les pressions politiques en ce sens pourraient être fortes, l’an prochain. Tout dépendra des conclusions de l’enquête militaire, note M. Milner.