Un rapport confidentiel de la marine nationale dénonce le non-respect des mesures de protection du thon rouge

  • Dernière mise à jour le 18 septembre 2009.

Les mesures destinées à protéger les stocks de thon rouge en Méditerranée n’ont pas réussi à réduire la pêche illégale, montre un rapport confidentiel de la marine nationale.

Le quotidien britannique Guardian a eu accès au rapport confidentiel d’une inspection de la flotte de pêche, menée par la marine nationale, qui montre comment les bateaux de pêche de la région sont pris en flagrant délit de non-respect de la réglementation mise en place pour protéger les stocks. Les experts indiquent que le rapport montre que les contrôles existants ne sont pas suffisants pour protéger les espèces et que des mesures plus strictes sont nécessaires.

Cette révélation intervient alors que la commission européenne doit se prononcer lundi sur l’inscription du thon rouge sur la liste des espèces en danger, ce qui pourrait mener à une interdiction immédiate de la pêche et du commerce.

Sergi Tudela, responsable de la pêche à WWF Méditerranée, a déclaré : "Ce rapport montre la situation réelle de la pêche, plus que n’importe quelles mesures qui sont pas vraiment inappliquées. Il est évident que la pêche au thon en Méditerranée est toujours complètement hors de contrôle et que la pêche illégale se poursuit sans contrainte. Les mesures de gestion adoptées sont loin en dessous de ce qui est demandé par les scientifiques, mais même elles ne sont pas appliquées sur le terrain."

Les stocks de thon rouge en Méditerranée — où ils se reproduisent avant de se diriger vers l’Atlantique — se sont effondrés au cours des années 90, poussés par la demande de sushi, pour lesquels leur chair tendre est très demandée. Les chiffres sont maintenant d’environ un cinquième de ce qu’ils étaient en 1970.

Le poisson devrait être protégé par une institution intergouvernementale, l’International Commission for the Conservation of Atlantic Tunas (ICCAT), qui régule les prises et l’activité de pêche. L’organisation a toujours été critiquée par les scientifiques et les écologistes parce qu’elle fixe des quotas au-dessus des niveaux supportables et ignore les conseils des experts.

Le rapport de la marine nationale décrit une inspection surprise des pêcheurs de thon dans l’est de la Méditerranée par le patrouilleur Arago en mai dernier. Le patrouilleur a inspecté 24 bateaux de pêche turcs, espagnols, italiens, grecs et chypriotes effectuant de la pêche à la seine, un filet géant qui encercle les thons, les pousse vers la terre, où ils sont transférés dans des fermes aquacoles en eau peu profonde pour y être engraissés.

Le rapport critique fortement la flotte de pêche turque. Il explique : "Les Turcs ne semblent pas appliquer la réglementation. Les documents d’enregistrement ne sont pas remplis ou n’existent pas. Il n’y a pas d’observateurs de l’ICCAT sur les bateaux ou le bateau n’est simplement pas enregistré auprès de l’ICCAT."

Selon les règles de l’ICCAT, chaque bateau de plus de 24 m de long doit avoir un observateur régional à bord pour pouvoir pratiquer la pêche.

Le rapport de l’Arago indique qu’ils n’ont trouvé qu’un seul observateur dans toute la flotte, et ont soulevé des points d’interrogation sur son honnêteté. "Après les inspections, il trouvait toutes sortes d’explications ou d’arguments fallacieux pour essayer de justifier le non-respect des recommandations de l’ICCAT. De plus, les estimations de la quantité de poisson dans les cages qu’il a fourni sont en moyenne 10 fois inférieurs à celle estimée par les plongeurs de l’Arago."

Au total, le rapport de l’Arago rapporte 22 infractions aux règles de l’ICCAT, dont la pêche sans licence, l’absence d’enregistrement des prises ou la pêche de poisson ne faisant pas la taille autorisée.

Source : The Gardian (Grande-Bretagne)