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Crédit photo Jacquotte Samperez
Trois tonnes de fuel sont parties à la mer dans le port de Nouméa à la suite d’une collision entre un cargo et un pétrolier, hier matin, à 7 heures. Tel était le point de départ du scénario réalisé dans le cadre d’un exercice de lutte contre les pollutions accidentelles. - L’opération était supervisée par le commandant de la Marine nationale. Elle a mobilisé, durant toute la journée, des moyens en hommes et en matériel de l’Etat, du Territoire, de la SLN et du Port autonome.
A cause d’une propulsion défectueuse, le cargo Baltimar Sirius heurte le pétrolier Singapore River accosté au poste 5 du quai de la SLN. Une fissure dans sa coque entraîne un rejet à la mer de trois tonnes de combustible de cargaison. Le pilote du cargo donne alors l’alerte au Port autonome et au MRCC (PC Secours en mer). Un transfert de soute est effectué à bord du pétrolier et met fin à la fuite. Le commandant déverse 50 kg de copeaux de bois à la mer pour simuler la nappe. L’exercice pratiqué hier dans le port de Nouméa s’est déroulé selon les dispositions relatives à l’intervention des pouvoirs publics en cas d’accident maritime majeur. Il est prévu que les services concernés s’entraînent une fois par an de manière à évaluer leurs moyens de lutte.
Mesures d’urgence, réaction des équipes, mise en place des procédures... les objectifs de l’exercice Polmar 2004 étaient, pour le Port autonome et la SLN, de tester les plans d’opérations internes dans leurs zones de responsabilité. Il s’agissait aussi, pour le PC Polmar installé au PC Secours en mer, d’évaluer le nouveau plan 2004. L’autre intérêt était, pour l’ensemble des acteurs, de prendre conscience des capacités et des limites de chacun. L’exercice Polmar 2004 a essentiellement été consacré à la partie maritime de la lutte. Le volet terrestre a été limité à un exercice théorique sur le papier. La direction de la Sécurité civile y a été associée sans que soit constitué un centre opérationnel de défense (COD) au haut-commissariat.
L’évaluation de la menace et de la dérive des hydrocarbures à cause des courants a été conduite avec la collaboration de l’Institut pour la recherche et le développement. La vedette Dumbea de la gendarmerie maritime a complété l’évaluation en évoluant sur les zones concernées. La SLN, affréteur du navire en cause, a assuré le rôle de consignataire de la cargaison. A ce titre, elle a été sollicitée par le PC Polmar mer pour communiquer les informations relatives au déroulement de l’exercice. Elle a, par ailleurs, activé son plan d’opérations interne et ses équipes d’intervention. Au plan technique, il s’agissait de mettre en œuvre des barrages flottants de rétention, de récupérer le produit polluant à l’aide d’écrémeuses et de le stocker dans un réservoir spécialement conçu pour cet usage. Le dispositif a permis d’évaluer les modèles de dérive de nappe élaborés par les chercheurs de l’IRD, de tester la coordination et les moyens de liaison entre les participants. Restait ensuite à envisager le traitement final des produits récupérés.
Un observateur néo-zélandais était présent lors du déroulement de l’exercice. Rod Service était invité par la Marine nationale. Il travaille à la NZSMA (organisme qui régit la sécurité maritime) dont il est un des dirigeants. Rod Service est reconnu comme expert international des pollutions maritimes. Il a collaboré à des études sur ce thème aux Etats-Unis, en Australie, à Fidji. Il est venu à Nouméa préparer une convention d’échanges de matériels et d’entraînements réciproques entre la Marine nationale française, d’une part, et le NZSMA, d’autre part. Cette convention, appelée MOU (Memorandum of understanding), permettrait en cas de besoin de demander à la Nouvelle-Zélande un prêt de matériel et d’obtenir des conseils d’expert. Réciproquement, la Nouvelle-Zélande pourrait demander, en particulier, du matériel de dispersion en haute mer.
Le NZSMA est en effet une structure civile qui ne dispose pas des moyens hauturiers que procure la Marine nationale en Nouvelle-Calédonie. Et la marine néo-zélandaise n’est pas équipée en matériel d’épandage.
La Marine nationale disposait de peu de matériel mais elle en a acquis beaucoup dans les six derniers mois. Elle dispose aujourd’hui d’une écrémeuse de gros débit, du type de celles qui ont servi sur les pollutions par des pétroliers en Europe ; d’un pollutank de 16 mètres de long, d’une capacité de 50 tonnes ; de barrages portuaires supplémentaires et d’un flexidam. Le flexidam est une sorte de poire qui permet de récupérer des polluants à partir du quai.
Ainsi, la marine a intégré la chaîne complète d’antipollution, c’est-à-dire le confinement, la récupération et le stockage, le retraitement des produits polluants dépendant de moyens terrestres. Pour les autorités, il était important de s’équiper car les statistiques établies sur le territoire montrent qu’une pollution relativement importante se produit environ tous les deux mois. En Nouvelle-Zélande, c’est une à deux fois par semaine. Le problème en Nouvelle-Calédonie, c’est que le lagon est vulnérable car il s’agit d’une zone maritime peu profonde et fermée avec une faune et une flore riches mais particulièrement sensibles aux pollutions.
– Double repères
Le Konemu mis à contribution : C’est le pétrolier calédonien Konemu qui a représenté le Singapore River à l’origine de la pollution après une collision avec le cargo Baltimar Sirius. Mais ce sont 50 kilos de copeaux de bois que ses marins ont jetés dans le port et non pas 3 mètres cubes de fuel lourd.
– Les participants
Ont participé à l’exercice le haut-commissariat, le PC Polmar mer (PC secours en mer), le Port autonome, la DITT (Service des phares et balises), la base navale de Nouméa, la SLN (Direction technique), la Shell (Direction technique), l’IRD (étude de la dérive de nappe) et Météo France.
– Les moyens maritimes
La mise en œuvre du matériel de confinement de la Marine nationale a été effectuée depuis un chaland. La récupération a été réalisée depuis le catamaran Eugène Morignat des Phares et Balises, à l’aide de l’écrémeuse embarquée après transport routier. Un remorqueur-pousseur a acheminé sur zone le réservoir de stockage.
– Les barrages Le déploiement des barrages flottants de contention a été opéré sur plusieurs centaines de mètres avec le concours du secteur « manœuvre » de la base navale et une participation des équipes d’intervention de la SLN.
– Les produits de traitement Les pollutions par hydrocarbures peuvent être traitées au moyen de techniques de récupération, de produits absorbants et de produits dispersants. Les produits absorbants existent en vrac, sous forme de poudre, de fibres, de copeaux, de fines particules et peuvent être conditionnés sous forme de tapis, de feuilles, de rouleaux, de barrages ou sous d’autres apparences. Dans la pratique, le traitement nécessite l’emploi d’un volume d’absorbant au moins double du volume de polluant à récupérer. Coûteux et difficiles à mettre en œuvre, ils ne sont utilisés que pour récupérer de faibles quantités de pétrole.
Les produits de dispersion sont quant à eux toxiques. Pour cette raison, ils ne sont employés qu’en pleine mer et ne peuvent pas être utilisés dans le lagon.
La France a créé au niveau national un fonds Polmar financé par la puissance publique, dont la vocation est de préfinancer les dépenses exceptionnelles de lutte des services de l’Etat, des collectivités locales et, dans certaines limites, les aides aux professionnels affectés.
Hervé Girard
Source : Les Nouvelles Calédoniennes