Le chef d’état-major explique la nécessité de la marine nationale

  • Dernière mise à jour le 4 mars 2008.

Il n’est pas surprenant de voir que beaucoup de "terriens" considèrent les marines comme des alternatives coûteuses aux forces terrestres. Les marines doivent donc généralement mener des combats continuels pour expliquer ce qu’elles peuvent et devraient faire pour le pays et ses citoyens. Le magazine Proceedings de l’US Naval Institute a demandé aux chefs d’état-major de plusieurs marines du monde comment ils expliquaient àleur gouvernement et àleurs citoyens pourquoi la marine est nécessaire et justifie le prix qu’elle coûte. Voici la réponse faite par le chef d’état-major de la marine nationale.

La mondialisation, avec son impact sur l’économie et l’environnement stratégique, est l’événement clé du 21è siècle. Elle donne de nouvelles opportunités ou ébranle la vie de chacun, selon le point de vue où on se place. Elle conduit, néanmoins, au développement d’un monde sans frontières dans lequel l’auto-suffisance des nations est progressivement remise en cause par les tendances transnationales de l’économie et de la technologie. Par conséquent, les nouvelles frontières de notre sécurité sont mondiales, couvrant tous les océans.

La mondialisation rend aussi le monde absolument dépendant de la libre circulation des marchandises, qui sont en grande partie transportées par la mer. "Chaque famille dépend du commerce pour simplement survivre," comme l’a dit Alan Greenspan. En ce qui concerne sa dynamique toujours changeante, basée sur "juste ce qu’il faut, juste à l’heure," la défense de la libre circulation doit être proactive et permanente.

Dans ce contexte, la puissance maritime est la clé de ce processus de mondialisation et donne des possibilités et des défis de même que des vulnérabilités. Par conséquent, il y a un lien direct entre les forces navales et la préservation de notre prospérité et de notre mode de vie, non seulement pour défendre notre territoire mais aussi pour préserver nos intérêts nationaux en ce qui concerne les nouveaux enjeux et les nouvelles menaces, et pour soutenir notre compétitivité économique.

Ce n’est pas un question d’être une force décisive autour du globe, de suprémacie en mer ou de contrôle des mers. C’est à propos de la sécurisation de la mer et de la rendre sûre pour tout le monde pour un usage légal et libre. Les contrebandiers, trafiquants de drogue, et même les pirates sont parfaitement conscients de tous les avantages que donne la liberté des mers.

Cela signifie que ce n’est plus une question de puissance nationale mais un problème que nous devons partager avec toutes les nations, y compris les pays enclavés. Rendre la mer plus sûre est une question de gouvernance internationale. Cela nous oblige à revoir notre engagement international d’une manière où la coopération est plus forte que la tendance égoïste résultant de la pénurie de ressources.

Défendre ce système exige un éventail plus large de moyens navals qui couvrent tout le spectre des conflits — combat de haute intensité, opération de secours humanitaire, diplomatie navale, influence politique — qui traduit dans la capacité de prévenir les conflits en montrant nos intentions militaires, en effectuant des missions de stabilisation ainsi que de surveillance des pêches et de protection de la biodiversité.

Nos citoyens attendent que la sécurité et la sûreté contribuent à notre développement et à notre prospérité. La mondialisation a intensifié l’inter-dépendance entre la prospérité, la sécurité des réseaux d’approvisionnement, l’accès aux ressources stratégiques, et notre capacité à influer directement d’autres états ou d’autres économies. Voila la raison pour laquelle il faut convaincre nos citoyens de la nécessité d’investir dans leur marine pour leur propre bien et leur propre sécurité.

Amiral Pierre-François Forissier

Chef d’état-major de la marine nationale

Titre et traduction : Gilles Corlobé

Source : Proceedings (Etats-Unis)