Le monde veut s’occuper de la menace que constituent les pirates

  • Dernière mise à jour le 26 novembre 2008.

Dans leurs embarcations gonflables et armés de bazookas, les pirates somaliens aux pieds nus constituent une menace pour le commerce mondial.

4 bâtiments de l’OTAN patrouillent actuellement au large de l’Afrique, protégeant au nom des Nations Unies des cargos transportant de la nourriture. Des bâtiments appartenant à l’opération européenne Atalanta les remplaceront le 8 octobre.

L’OTAN se prépare à rester plus longtemps, vu la lenteur de la préparation de la mission européenne. La semaine dernière, on ignorait toujours si les responsables militaires de l’Union à Bruxelles seraient même prêts à présenter leur projet d’opération d’ici le 5 décembre. Sans lui, le Parlement allemand, le Bundestag refuse de seulement évoquer une éventuelle participation de la marine allemande à cette opération.

Mais les lois et les règles d’engagement ne sont pas le seul point de blocage pour les forces navales occidentales. Que ce soit sous commandement de l’OTAN, de l’ONU ou de l’Union Européenne, elles sont tout simplement dans une position trop fragile. Les pirates sont rapides, "professionnels", explique le vice-amiral Gérard Valin, commandant la zone maritime de l’océan Indien. Un bâtiment de guerre doit absolument intercepter les pirates pendant les 15 minutes critiques qu’il leur faut pour aborder un navire. Une fois que les pirates ont pris des otages, la fenêtre très étroite pour l’action militaire s’est refermée.

Une frégate avançant à pleine vitesse peut atteindre une vitesse de l’ordre de 30 nœuds, soit environ 8 nautiques en 15 minutes. C’est, indique l’amiral Valin, un rayon d’action minuscule. "Lorsque les pirates voient un bâtiment de guerre à l’horizon, ils savent qu’ils ont tout le temps pour faire leurs attaques." Selon les calculs de l’amiral Valin, un bâtiment de guerre ne peut sécuriser qu’un à 2 % des eaux situées au large de la Somalie.

Le Commodore Keith Winstanley de la Royal Navy ajoute : "Les pirates vont aller où nous ne sommes pas. Si nous patrouillons dans le golfe d’Aden, ils vont aller à Mogadicio, et vice-versa." Pour faire face à ces difficultés un officier américain recommande que les armateurs prennent des mesures actives de protection. Cela veut dire naviguer en convois et utiliser des mesures défensives comme des barbelés, des clôtures électriques et des canons soniques. Les armateurs pourraient aussi engager des mercenaires pour se protéger.

Pendant des années, la 5è Flotte américaine a patrouillé au large de la Corne de l’Afrique. La frégate russe Neustrashimy patrouille aussi au large de la Somalie et Moscou envoie désormais plus de navires dans la région.

"Il ne faut pas avoir d’illusions"

Ce sont des mesures bien intentionnées, disent les experts, mais ils soulignent que c’est loin de sécuriser les 3.000 kilomètres de côtes de Somalie. Et contrôler l’océan Indien, où le Sirius Star a été attaqué, est une tâche impossible. "Nous ne devrions pas avoir d’illusions," déclare l’amiral Valin.

Si les Russes et une poignée de responsables de l’ONU savaient s’y prendre, cela pourrait provoquer une escalade conduisant à une guerre. Dmitry Rogozin, l’ambassadeur de Moscou à l’OTAN a appelé l’Union Européenne et l’Alliance occidentale à "éteindre" le fief des pirates à terre. Rogozin propose une "opération côtière" limitée, et explique que cela serait le seul moyen de se débarrasser des pirates.

Bien qu’il ait probablement raison, l’idée d’une opération limitée dans un pays comme la Somalie, débordant de haine et de violence, est impossible.

Les troupes occidentales seraient attirées dans l’horreur d’une guerre civile faisant rage entre des chefs de guerre, des islamistes et des clans, guerre qui a déjà fait des dizaines de milliers de morts — la même aventure qui s’était terminée en cauchemar pour les Américains en 1994. A cette époque, des soldats américains envoyés pour secourir la population, avaient été contraints de se retirer sous une pluie de balles. A Mogadiscio, une foule avait trainé en triomphe dans les rues le corps d’un soldat américain abattu.

En effet, une intervention militaire semblerait si facile dans les paysages de savane, plats de la région côtière de Somalie. Là où la vue sur terre s’étend presqu’aussi loin qu’en mer, il y a peu de places où se cacher.

Source : Der Spiegel (Allemagne)